L'ARGENT N'AIME PAS LE BRUIT: PRINCIPE DE GESTION GABONAIS DE LA CHOSE PUBLIQUE




L'argent n'aime pas le bruit. Cette phrase fut introduite dans le lexique gabonais, au cours des années 80, par l'ineffable Léon Mebiame, alors Premier Ministre d'Omar Bongo. Léon Mebiame utilisa cette phrase pour répondre à la question d'un journaliste voulant savoir la provenance et l'utilisation de certains deniers d'états. En toute réponse, Léon Mebiame répliqua: "l'argent n'aime pas le bruit". Donc "chuuuut", quand il s'agit d'argent, même de l'état, circulez y a rien à voir ni à entendre; seuls les initiés ont droit au chapitre. Au Gabon, nous payons lourdement, tous les jours, de l'institutionnalisation de l'opacité en matière de gestion publique.

1. Tout le tissu économique gabonais est opaque. Forcement, ses dérives le sont aussi
Si vous avez le culot d'oser demander un jour à qui de droit, de vous dire comment la filière pétrolière est gérée au Gabon? Vous risquez de vous faire répondre: "l'argent n'aime pas le bruit". Si vous demandez pourquoi le pétrole gabonais est géré dans le secret, depuis les années 70 par des gens comme Samuel Dossou qui n'ont des comptes à rendre qu'aux Bongo? On va vous répondre: "l'argent n'aime pas le bruit". Si vous demandez comment une société comme Air Gabon, en situation de monopole et avec des avions toujours pleins, a pu faire faillite? On va vous répondre: "l'argent n'aime pas le bruit". Si vous demandez comment l'Octra a fait faillite, Sogacel, Gabon-Telecom, AgroGabon etc.? On vous répondra: "l'argent n'aime pas le bruit". Les conséquences de cet état d'esprit en amont de la gestion des finances du Gabon, se répercutent irrémédiablement en aval, avec des résultats catastrophiques qui fassent que si vous demandez comment un haut fonctionnaire qui a un salaire de base de 650000 francs CFA à la fonction publique, avec des fonds communs ne dépassant pas les 10 millions, peut il s'offrir une villa de 150 millions à Libreville, une autre de 50 millions dans son village, un Toyota VX de 50 millions pour lui et un Prado de 30 millions pour madame, le tout simultanément et sans crédits bancaires? On vous répondra: "l'argent n'aime pas le bruit". La perversité de la banalisation des détournements de fonds au Gabon est telle que détourner est devenu la norme et ne pas détourner est désormais l'exception. Vous vous souviendrez certainement des expressions "ministre madjango" ou encore "les blancs maniocs" qui se disent des ministres ou ex-ministres ou des blancs résidents au Gabon, qui n'en ont pas plein les poches. Ces ministres sont la risée du gabonais de la rue car il ne peut pas admettre de voir un ministre ou un blanc fauché. C'est ça les dégâts de la mauvaise gouvernance. Les gens perdent tous les repères de gestion, et on ne s'étonne même plus de voir un chef d'état sortir un million de dollars "de sa propre poche" pour « aider » des sinistrés à Mouila. Imaginez dans n'importe quel pays normal, où la gestion est prise au sérieux, que le Président ou Premier Ministre sorte cette somme comme ça de sa « poche »; mais les citoyens vont demander d’où sort cet argent et comment il a fait pour l'avoir? Au Gabon, non, tout se passe comme si un chef d'état devrait être capable de sortir un million de dollars de sa poche arrière. Personne ne pose trop de questions, tout le monde observe la maxime de Léon Mebiame qui disait: "l'argent n'aime pas le bruit". Même la fameuse Commission de lutte contre l’enrichissement illicite (CNLCEI), qui n’est qu’un pétard mouillé, ne dit rien. Certainement que les membres de cette commission aussi pensent que « l'argent n'aime pas le bruit ». Malgré l’existence de preuves, comme ce fut le cas du compte d’Alaba Fall à la BGFI, qui révélait un solde de plus de 200 millions alors que le bonhomme avait un salaire de 1,3 millions. Comment faisait-il pour amasser ce pactole? Jusqu'à nos jours, la commission dort, « l'argent n'aime pas le bruit ». Par contre, c’est la pauvre demoiselle de la BGFI qu’on envoya en taule. Le monde à l’envers.

2. Le Gabon doit s'adapter à de nouvelles formes de gestion
Le Gabon doit tirer les leçons du passé et comprendre que sans nouvelles formes de gestion, point de salut. Pour ce faire, 2 conditions s’imposent; une condition politique qui voudrait faire table rase des méthodes anciennes en balayant le bongoïsme et le reléguant aux poubelles de l'histoire; une condition purement académique et judiciaire qui demanderait la formation de gens capables de mettre en place un système stable avec les gardes fous afférents. Au Gabon, le problème n’est pas d’avoir rencontré des drames et fait des erreurs monumentales, au cours des 42 dernières années; le vrai problème est de ne pas pouvoir tirer les enseignements de ces douloureuses expériences. En jetant un regard, même rapide, sur les bêtises qui ont marqué les 42 dernières années, sur les opportunités ratées par le Gabon, il est possible que les gabonais prennent conscience de l’importance de la bonne gouvernance, et mettent en place des mécanismes qui permettraient d'y aboutir. Mais il y a aussi qu'on ne peut pas faire de la bonne gouvernance avec ce régime en place, impossible. Un changement de régime au Gabon, permettrait un renouvellement rapide de la direction du pays. Il n'y a qu'un changement de régime qui pourrait arrêter les pertes sèches que le Gabon connait, à cause de l'opacité de la gestion du pétrole. Si les Bongo et les Dossou sont dehors, on repart à zéro. Mais avec eux aux commandes, on ne va nulle part. Un changement de régime permettrait de nettoyer la fiscalité et les recettes douanières et retirer ces secteurs clés de l'économie nationale des mains prédatrices de la famille Bongo. Avec eux au pouvoir, le préjudice subi par le trésor public va continuer à avancer.

Avec les Bongo au pouvoir au Gabon, nous connaissons depuis 1978, soit 32 ans, la persistance de la crise et ses effets dévastateurs. Les actes honteux commis par nos compatriotes à la BEAC ne sont que la partie émergée de l'iceberg qui nous donne une image de la manière dont le pays a été géré. Le manque à gagner pour l’état, que nous occasionne, la présence des Bongo au pouvoir est inestimable. Par exemple, qui peut nous dire à combien s'élèvent les frais à l'état de tous les voyages qu'a entrepris Ali Bongo depuis qu'il a pris le pouvoir? Zut, on connait déjà la réponse: "l'argent n'aime pas le bruit".

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